C'est quoi c'bordel ? [Dorian]

Voilà plusieurs jours qu'Alfred a amené l'oiseau blessé à Adrian afin qu'il le sauve. Le marquis a bien cru que l'animal ne survivrait pas tant il était mal en point. Voir le corbeau aussi brisé, aussi tremblant de tous les coups qu'il avait reçu pendant son lynchage l'avait ramené à de douloureux souvenirs. Des souvenirs qui reviennent gratter sournoisement à la porte de son esprit alors que penché au dessus de son  nouveau protégé, le marquis examine l'aile qui restera probablement atrophiée. Lui aussi à connu ça... Il lui parle. Lui murmure qu'il sait. Qu'il comprend. La compassion dans sa voix susurrée est réelle et réconfortante. Adrian a toujours eu un don avec les animaux, selon sa mère. Lui ne l'a jamais vu ainsi, mais il prouve pourtant chaque jour à leurs côtés. Il a cette connexion. Ce fluide qui passe dans ses doigts à leur corps et qui s'échange dans leurs yeux lorsqu'ils se rencontrent. Le corbeau pourrait se débattre, chercher à le fuir, mais il est calme sous ses mains soignantes. Comme si il était dans un cocon de bien être et de sécurité après tout ce qu'il a enduré. Comme si Adrian d'une certaine façon, le berçait de sa voix afin de lui rendre l'instant moins pénible. Lui aussi a connu ce sentiment d'être prostré, secoué de spasmes de douleur tant son corps était choqué de la violence qu'il avait subi. Lui aussi a senti sa peau déchirée. Son échine le brûler au point d'en hurler. Il sait et c'est sans doute ce qui les connecte. Avec d'infinies précautions, ses doigts fouillent sous les plumes du corbeau à la recherche des nombreuses plaies qui commencent à cicatriser correctement.

Satisfait de l'avancement des choses, Adrian caresse la tête de l'animal puis recule doucement afin de ne pas le brusquer et risquer le faire sortir trop violemment de sa quiétude. Rassemblant les bandages sales dans une écuelle, il quitte sa volière afin d'aller déposer tout ça auprès des domestiques qui se chargeront de les laver et d'aller chercher de quoi le nourrir.
Le soleil est jeune dans le ciel mais l'air est doux. Une lumière rosée tombe sur le jardinet de l'arrière de l'hôtel particulier du marquis qui respire l'air à plein nez. C'est une heure plus que matinale mais qu'il apprécie. La ville est encore silencieuse à ce moment de la journée. La nature s'éveille, parsemée de rosée et il y a cette odeur particulière de matin neuf qui flotte autour de lui.
Les bandages confiés à Philip - qui doit avoir quelques dons de vampirisme, cet homme ne dort jamais ! - Adrian descend en cuisine jusqu'à cette pièce où il conserve ce qui est nécessaire au régime alimentaire de ses oiseaux mais aussi au reste de ses animaux. Car si la plupart de ses bêtes demeurent chez lui en Cornouailles où le domaine est bien plus vaste qu'ici à Londres, il ne se déplace jamais sans Haven et quelques oisillons qu'il préfère garder à l'œil et donc à proximité de lui plutôt que de les laisser à BudeHaven.  

Alors qu'il revient vers sa volière ses mains chargées d'un plateau avec les portions de chacun, il entend l'affolement des piaillements. Fronçant ses sourcils, il presse le pas et se fige d'horreur alors que près de la cage d'un de ses oiseaux, il reconnait le chat de son cousin. Le canard mandarin de quelques mois bat des ailes dans tous les sens totalement paniqué, imité par le faucon et le corbeau.
Adrian jette à moitié sa charge et jure en se jetant sur le chat qui se ratatine sur lui-même et tente de fuir mais pas assez rapidement pour que la poigne du marquis ne s'abatte pas sur son cou.

- DORIAN ! hurle-t-il.

Bon sang où est-il celui-là encore ! Adrian prend quelques secondes afin de s'assurer qu'il y a eu plus de peur que de mal, puis quitte les lieux afin de remonter chez lui. Les domestiques s'écartent tous sur son passage, se jetant presque dans le mur plutôt que d'affronter le courroux qui semble avoir pris leur maître qui monte les marches de l'escalier central quatre à quatre, le matou toujours ballottant dans sa main qui ne peut qu'attendre qu'on daigne le relâcher.

- DORIAN !

Adrian martèle la porte de son poing et comme la réponse tarde à se faire entendre, il fait irruption dans la chambre à coucher de son cousin dont les rideaux sont encore tirés. Bon sang ça sent le fauve là dedans ! A quelle heure est-il rentré encore ? Et dans quel état ?
Avançant d'un pas franc à travers la pièce, Mountbatten ouvre les lourdes tentures qui instantanément laissent entrer les très lumineux rayons de soleil dans la pièce dont la vision laisse Adrian pour le moins perplexe.

- Dorian ! tire-t-il la couverture avant de lui lancer son chat sur les genoux. Je croyais t'avoir dit que je ne voulais pas le voir traîner de près ou de loin vers la volière !

Ses yeux ont la couleur du ciel avant la tempête et lancent des éclairs. Visiblement irrité mais surtout à bout de patience qu'il n'a déjà pas en qualité première, le marquis se baisse afin de ramasser chemise et pantalon qu'il rejette dans un geste d'humeur sur une banquette non loin qui est déjà couverte d'autres vêtements.

- Tu peux m'expliquer ce bazar ?! Rappelle moi ce que tu es venu foutre ici mon cher cousin autre que sortir culbuter je ne sais quel derrière la nuit pour ensuite dormir jusqu'à midi ?

Un programme qu'il suit lui même parfois il ne peut pas le nier, mais il occupe tout de même ses journées à autre chose que cela ! A l'occasion... En tout cas à lui sa chambre est rangée ! TOUT est toujours rangé !
Adrian a accepté d'accueillir Dorian et s'estime ne pas être le tuteur le plus embêtant de la terre mais il y a des limites ! Si il y a bien une chose que feu son cruel paternel a réussi à ancrer en lui à force de coups trop souvent portés d'avoir voulu le faire rentrer dans ce moule de fils parfait, c'est la rigueur et voir son cousin aussi désinvolte et bordélique a le don de lui taper sur les nerfs !